Les actualités autour de la science-fiction en mars 2023

 

L’édito

Tous à Bruxelles

Notre podcast s’exporte à la Foire du livre de Bruxelles ! Le dimanche 2 avril à midi, nous serons en compagnie de Pierre Bordage à la Maison de la Poste pour un épisode spécial où nous évoquerons son roman Abzalon. Cette rencontre sera l’occasion de parler avec le public.

Alors que nous vivons une époque où la réalité et la science-fiction se ressemblent de plus en plus, que nous connaissons un âge d’or des productions audiovisuelles, on peut regretter un manque d’espaces pour des débats sérieux sur notre genre préféré.

Nous devons réussir à créer plus d’endroits où des auteurs et autrices peuvent discuter et surtout confronter leurs idées et leurs visions du monde avec des essayistes, des influenceurs, des lecteurs, des scientifiques, des spécialistes, des universitaires… Un nouveau public qui a soif d’écologie et d’utopie découvre en ce moment la SF.

Les anciennes et récentes œuvres cinématographiques et littéraires peuvent être des terreaux fertiles d’échanges. Malgré les nombreux salons spécialisés, il devient difficile de débattre sur toutes les grandes questions qui traversent nos sociétés sans tomber dans la caricature du clash et de l’invective, ou encore dans une unanimité béate.

Mais il ne tient qu’à nous de recréer des espaces qui feront rayonner l’art de la conversation, en même temps que celui de la science-fiction. 

 

Visuel de l’édition 2023 de la Foire du livre de Bruxelles

 

C’est (vraiment) plus que de la SF…

 

Travailler plus grâce aux exosquelettes ?

«Les déménageurs, les couvreurs, les gens dans les travaux publics sont équipés d’exosquelettes», annonçait il y a peu, et très sérieusement, le sénateur François Patriat, avant de revenir sur ses propos. Alors que les manifestations contre la réforme des retraites font rage, des ministres et des parlementaires prônent l’utilisation d’exosquelettes pour travailler plus longtemps.

C’est le média Basta! qui enquête sur cette lubie autour des prothèses mécaniques que les amateurs d’Alien, d’Elysium ou d’Avatar connaissent bien.

Cependant, notre confrère Ludovic Simbille explique que «les exosquelettes amplifient certains dangers liés au frottement, au stress, aux sollicitations cardio-vasculaires ou aux déséquilibres corporels».

Comme le souligne le sociologue du travail David Gaborieau dans l’article, «ces innovations ne répondent pas au vrai problème tant qu’on n’interroge pas l’organisation du travail». 

L'hibernation artificielle, bientôt une réalité ?

«Rendez-vous dans un demi-siècle », écrivait Hubert Barrère de Tartas, alias Louis de Funès, dans le film Hibernatus (1969). La prophétie était presque exacte car des chercheurs chinois ont réussi à plonger des singes dans un état d'hypothermie artificielle. À l’inverse de certains mammifères, le refroidissement de la température de notre corps peut nous être fatal.

Cette nouvelle technique, qui pourrait permettre un jour à l'humanité de parcourir des distances interstellaires en état d'hibernation, a surtout retenu l'attention de la communauté médicale pour son potentiel à sauver des vies en cas d'urgence médicale ou pour préserver des organes prélevés sur un donneur.

Bientôt un voyage à la Interstellar ou via des navettes comme l'Avalon de Passengers ?

Ressortie de The Host

À l’époque, il n’avait pas encore cette aura internationale. En 2006, le réalisateur sud-coréen Bong Joon-ho marquait pourtant les esprits avec The Host, un film de monstre effrayant mêlant drame familial, satire sociale et science-fiction.

Cette pépite, qui a attiré plus de 13 millions de Sud-Coréens dans les salles obscures, ressort chez nous avec une remasterisation 4K grâce au distributeur The Jokers Films.

Le réalisateur de Parasite était présent à Paris, au Grand Rex, le 26 février dernier pour une masterclass et la présentation du film.

The Host relate l'histoire de Park Gang-du, un homme simple et gentil déconnecté du système, interprété par Song Kang-ho (lauréat du prix d'interprétation au Festival de Cannes 2022 pour Les Bonnes Étoiles) qui voit sa fille enlevée par un monstre géant surgi de la rivière.

Gang-du se lance alors dans une quête désespérée avec sa famille pour la retrouver. Incontournable ! 

 

Nos recommandations des meilleures œuvres de science-fiction en mars 2023

 

Hello Tomorrow!

Tout semble idyllique dans Hello Tomorrow!, la nouvelle série de science-fiction d’Apple TV + qui imagine des années 50 rétrofuturistes.

Comment ne pas être bluffé par son production design (Cadillac volantes, jet packs, robots servant de la bière) et par son excellent casting emmené par un savoureux Billy Crudup ?

Ce show aux épisodes d’une trentaine de minutes narre les combines d’un petit groupe de commerciaux censés vendre des parcelles lunaires habitables. Mais les fissures ne tardent pas à apparaître…

Hello Tomorrow! est un féroce critique du fameux rêve américain dans une atmosphère d’âge d’or de la SF. Entre Fallout et Mad Men, cette proposition nous a convaincus.

La justice à l'épreuve des réseaux sociaux

C’était le procès médiatique de l’année 2022 : Johnny Depp VS Amber Heard. Deux acteurs hollywoodiens autrefois glamour se sont retrouvés face à face dans une bataille juridique intense, diffusée en direct sur internet. Mais ce qui aurait pu être un simple procès pour diffamation a rapidement dégénéré en un épisode digne de Black Mirror.

Dans la droite lignée de documentaires comme The Social Dilemma ou The Great Hack, ce nouvel épisode de la série La Fabrique du mensonge (disponible sur France 5 en replay) explore les méandres de la manipulation algorithmique et son impact sur un tribunal.

La qualité des intervenants de ce documentaire réalisé par Cécile Delarue permet de comprendre l’ampleur du désastre. Entre les complotistes, les masculinistes et la culture du LOL, Amber Heard avait-elle vraiment une chance ?

Not All Robots

«J’ai écrit cette histoire avec l’espoir de nous faire réfléchir à la façon dont notre sentiment de pouvoir a fait de nous les geôliers consentants de notre propre prison », révèle le scénariste Mark Russell dans la postface de Not All Robots.

Cette satire inspirée par le «Not All Men » de #MeToo en 2017, dessinée par l'artiste Mike Deodato Jr., narre la cohabitation désastreuse entre humains et robots. L’homme est maintenant inutile et des robots se disputent dans des talk-shows pour savoir quoi faire de nous.

Dans ce comics piquant, qui n’hésite pas à donner des coups de canif à l’idéal de la famille américaine, Mark Russell en dit beaucoup sur notre obsolescence. 

 

Kosmograd

L’album Kosmograd conte l'histoire d'un groupe de jeunes filles rebelles cherchant à résister à l'ordre établi. Alors qu’une tempête se prépare à détruire l’une des dernières villes refuges de la Terre, les riches tentent de quitter la Terre via un ascenseur spatial. Il est difficile de ne pas penser à Blade Runner 2049 devant le futur accablant que propose cette BD publiée chez Casterman.

Le dessin est séduisant. Le style de Bonaventure, entre comics et BD franco-belge, avec des décors labyrinthiques, fonctionne à merveille. On apprécie l’efficacité du découpage, mais aussi le rythme mené tambour battant. L’optimisme des personnages et le graphisme hybride plaira à tous les publics, en particulier les adolescents.

Atomic Heart

Imaginez une Union soviétique alternative et rétrofuturiste, pervertie par une technologie ridiculement avancée. Un monde où la science a fait du surnaturel une réalité et où les robots sont désormais monnaie courante. Malheureusement, tout s’effondre et le major Sergei Nechaev, agent spécial du KGB, est censé faire le ménage.

Le jeu vidéo Atomic Heart s'inscrit dans la lignée des grands titres d’action uchroniques comme BioShock ou la franchise Wolfenstein. Mais il ne s'arrête pas là, empruntant des éléments de gameplay à d'autres œuvres cultes comme Half-Life et Portal, sans oublier la furtivité à la première personne qui fait le succès des jeux Arkane. Avec Atomic Heart et son univers atompunk, le studio Mundfish nous offre un excellent jeu vidéo de science-fiction teinté de cynisme.

 

Nos récents coups de cœur en science-fiction

 

L'Incal Infini

L’Incal fait son grand retour ! La BD culte imaginée par Alejandro Jodorowsky et Moebius et publiée entre 1980 à 1988 va bientôt avoir son jeu de société.

Porté par Manuel Rozoy et Guillaume Montiage, le projet Incal Infini est en plein financement participatif sur la plateforme Kiss Kiss Bank Bank.

L'objectif du jeu est simple : empêcher l'ennemi de mettre la main sur l'Incal Lumière avant qu'il ne soit trop tard. Avec des parties courtes (une trentaine de minutes) et des règles simples, préparez-vous a une course-poursuite effrénée où l'union fait la force.

Le crowdfunding, qui s’arrêtera dans une quinzaine de jours, propose de chouettes contrepartie à ne pas rater. 

Predator 2 : et si c'était ça, une suite (quasi) parfaite ?

Antoine Desrues a encore frappé ! Le journaliste d’Écran Large a réalisé une nouvelle vidéo YouTube passionnante pour défendre Predator 2, le film réalisé par Stephen Hopkins en 1990.

Dans un plaidoyer de quinze minutes, le spécialiste de la pop culture revient sur les coulisses de cette suite et surtout sur l’univers de la franchise.

Le film déborde d'une énergie pop impressionnante, en avance sur son époque. Derrière son apparence régressive et brutale, Predator 2 offre peut-être plus que ce que l'on pense.

Avec son éternel enthousiasme, Antoine Desrues donne surtout envie de revoir cette série B. 

The Last of Us : marre de la fin du monde !

Vous en avez assez des univers post-apocalyptiques ? Des récits dystopiques ? Des zombies ?

Avec humour et passion, le Bolchegeek revient sur cette tendance omniprésente sur grand et petit écrans depuis une quinzaine d’années. Alors que The Last of Us connaîtra une nouvelle saison, le youtubeur se demande si cette obsession pour la fin du monde n’est pas en train de devenir trop répétitive.

Cela fait quelque temps que des intellectuels et des spécialistes tentent de promouvoir des imaginaires radieux et prometteurs (comme Utopie radicale d’Alice Carabédian). Cette envie de fictions positives doit s’analyser à l’aune de l’éco-anxiété et de l’actualité.

Cette excellente chronique vidéo pour le journal L’Humanité questionne notre imagination sclérosée sur des futurs pessimistes à la manière de Planète B de Blast. 

 

Anemoia

L'album Anemoia d’Alt 236 est notre pépite musicale du mois. Avec ses sonorités sombres et mélancoliques, ainsi que des ambiances variées, cet album d’électro nous offre une expérience immersive. Les références à la science-fiction des années 80 ajoutent une dimension rétrofuturiste intrigante.

On a adoré Event Horizon et Silent City, des morceaux de musique atmosphérique, avec des textures sonores riches et complexes qui plongent l'auditeur dans un cocon onirique. L'album, disponible gratuitement sur YouTube, démontre la maîtrise technique d'Alt 236 (et son compère AL9000), ainsi que sa capacité à raconter une histoire par le biais de la musique.

Alt 236 confirme qu’il est surtout l’une des personnalités les plus intéressantes à suivre sur le web. Compositeur, documentariste et youtubeur : nous sommes séduits par tout ce qu’il fait !

Sparth

Sparth est un grand artiste français de l'art conceptuel, dont le style nous plonge dans des univers futuristes ou médiévaux captivants.

Ses créations nous emmènent dans de vastes paysages ou des bâtiments abandonnés, à l’ambiance mystérieuse et unique. Son art va bien au-delà des clichés de la science-fiction en offrant des appels à l'aventure et à l'exploration.

Ce concept designer basé à Seattle a collaboré avec des franchises de renom telles que HaloRageAssassin's Creed et Prince of Persia. Il a aussi illustré la trilogie de L’Interdépendance de John Scalzi. 

 

Connaissez-vous l’histoire de la campagne marketing First Moon Flights Club ?

Tout commence en 1964 lorsque le journaliste autrichien Gerhard Pistor entre dans une agence de voyages à Vienne. Il veut aller sur la Lune et, si possible, il aimerait y voler sur Pan Am, la compagnie aérienne la plus populaire au monde.

L'agence de voyages transmet la demande. Selon la légende, elle attire l'attention de Juan Trippe. Le fondateur et PDG de Pan American World Airways décide de faire un coup médiatique et de lancer le premier projet de tourisme lunaire. L’idée est de puiser dans une euphorie collective déclenchée par la Nasa et ses réussites majeures, à l’instar du lancement de la fusée Saturn V et, plus tard, des premiers pas de Neil Armstrong sur la Lune.
 
Juan Trippe se retrouve également aidé par la sortie du film de Stanley Kubrick et du roman d’Arthur C. Clarke 2001, l’Odyssée de l’Espace où le spectateur voit à l’écran la Pan Am envoyer des navettes de passagers sur la Lune.

Entre 1968 et 1971, Pan Am a émis plus de 93.000 cartes du club « First Moon Flights » à l'intention des passionnés de l'espace désireux de faire une réservation pour le premier vol commercial vers la Lune qui devait partir en 2000.

Les réservations se sont arrêtées en 1971 pour cause de difficultés financières. La compagnie a fait faillite en 1991. Vingt ans plus tard, Dennis Tito est devenu la première personne du monde à faire du tourisme spatial, mais ceci est une autre histoire…